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«Vies brûlées» à vif.

Par Didier Péron 14 février 2001 à 22:53

En 1965, en Argentine, un fait divers défraya la chronique. Des malfaiteurs s'attaquent à un convoi blindé transportant 7 millions de pesos et laissent derrière eux trois policiers sur le carreau. Ils quittent le pays et passent en Uruguay, se terrant dans un appartement de Montevideo où la police finira par les retrouver, menant un assaut à tout péter. Histoire plutôt banale sinon que, parmi les malfrats, il y avait deux hommes, Roberto Juan Dorda et Marcelo Brignonne, qui, unis dans leurs forfaits, l'étaient aussi par les liens d'un amour qui, apparemment, était connu et accepté dans le milieu de la pègre. C'est en se fondant sur ce tandem de Bonnie and Clyde gay et sur un roman de Ricardo Piglia inédit chez nous que le cinéaste argentin Marcelo Pineyro a chauffé son quatrième long métrage Vies brûlées (en VO, Plata Quemada, c'est-à-dire en réalité «argent brûlé») du bois noir de la folie incendiaire.

Crépusculaire. C'est peu dire que ce film est une surprise, d'autant que, si, depuis quelque temps, la distribution française se pique de productions argentines, jusqu'à présent aucun des films sortis ne semblait devoir marquer les annales. On ne sait trop quelle liberté le scénario prend avec la véracité historique, et d'ailleurs peu importe. On sait qu'entre l'histoire et la légende, le cinéma préfère la seconde option et exagère la vie en rituel sanglant et en ordure sacrée. En matière d'exagération, Marcelo Pineyro n'a manifestement de leçon à recevoir de personne, et l'équipée malade de son couple, rebaptisé Nene et Angel, s'accomplit en une geste crépusculaire empruntant aussi bien aux films de pègre américains qu'au climat d'apocalypse tropicale des premiers opus du Mexicain Arturo Ripstein.

Au début de Vies brûlées, le récit est confié en voix off à un narrateur. Parti pris rarement efficace, souvent redondant. En fait, le film avançant, le micro de la voix off passe de main en main, les points de vue changent et se mettent à commenter l'action comme le choeur antique la gabegie de la fatalité. Peu à peu, les flamboyants Nene et Angel se déchirent, Angel s'enfermant dans une psychose à tendance mystique et suicidaire. Pendant ce temps, Nene traîne dans les bas-fonds de Montevideo et s'envoie en l'air avec une jeune prostituée du coin. La situation ira de mal en pis jusqu'à la dernière scène, apothéose en forme de Walpurgis autodestructeur et fusionnel.

Acteurs de choc. Pour interpréter le duo central, il fallait deux acteurs capables de tenir le choc des séquences violentes et, deux plans plus tard, de s'embrasser à pleine bouche avec naturel et décontraction. Il faut donc applaudir bruyamment l'appariement lascif et fracassé de l'Espagnol Eduardo Noriega (vu pour la première fois dans le Tesis d'Alejandro Amenabar) et de l'Argentin Leonardo Sbaraglia. Ce dernier en particulier est pour nous une totale découverte bien qu'il semble une vedette chez lui, menant de front une carrière au théâtre, à la télévision et au cinéma. Sorte de mixte entre Tom Cruise et Antonio Banderas, il arrache. Espérons que Vies brûlées aura une audience suffisante pour convaincre quelques bonnes âmes de distribuer les précédents films de ce Pineyro tel Caballos Salvajes ou Cenizas del Paraiso.

Didier Péron Vies brûlées de Marcelo Pineyro avec Edouardo Noriega, Leonardo Sbaraglia, Pablo Echarri, etc. 2 h 05.